Ecoute Israël, l'Éternel,
notre Dieu, l'Éternel est UN.
Béni soit à jamais le
nom de Son règne glorieux.
Tu aimeras l'Éternel
ton Dieu, de tout ton cœur,
de toute ton âme
et de tous tes moyens
de toute ton âme
et de tous tes moyens
Ce texte fonde deux religions. Il s’agit du Chéma Israël, récité par les juifs deux
fois par jour, il s’agit, pour les chrétiens du début de la grande loi d’Amour énoncée
par le Christ. A cet amour de Dieu, le Christ n’oublie pas d’ajouter « Tu
aimeras ton prochain comme toi-même ».
Aujourd’hui, je ne peux m’empêcher de me dire que c’est
cette voie que j’ai essayé de suivre, jour après jour, dans tout le cheminement
autour de ma sexualité, celle que j’essaye de suivre encore aujourd’hui.
Tu aimeras le Seigneur
ton Dieu de toutes tes forces et ton prochain comme toi-même. Il y a donc
une trinité d’amour sur terre comme au ciel … Il y a pour moi, un rappel
fondamental : si l’amour de Dieu est inconditionnel, la façon dont nous
sommes les uns avec les autres est étroitement liée à la façon dont nous nous
acceptons.
… comme toi-même.
Pour beaucoup de jeunes, découvrant leur homosexualité, c’est
difficile, voire impossible. S’aimer soi en vérité, c’est accepter en nous la
différence d’un désir « hors norme ». C’est voir une image, celle des
homosexuels, et ne pas s’y reconnaitre. C’est d’abord, et avant tout accepter d’être
son propre prochain. Dans la parabole du bon samaritain, qui suit immédiatement
cette règle universelle d’amour, le Christ met en scène un Samaritain qui sauve
un Juif. Pour mettre à jour cette parabole, il faudrait parler d’un Palestinien
et d’un Juif, seule façon de comprendre la force de la scène décrite par le
Christ. Pour moi, accepter mes désirs homosexuels a été aussi difficile qu’a du
l’être le geste du Samaritain ou que celui de St François d’Assise pour le
lépreux. Aujourd’hui, j’ose espérer que l’image des homosexuels a évolué, qu’elle
est moins négative et moins caricaturale, qu’il est plus facile d’accéder à
cette acceptation.
Cette démarche d’acceptation et d’amour n’oublie pas la
vérité. Il ne s’agit ni de pitié ni de résignation. Pour aimer son prochain
comme soi-même, il faut être capable de se regarder en vérité dans le miroir de
l’âme et d’aimer vraiment ce qu’on y voit. Ce n’est qu’en ayant laissé la place
au regard d’amour purificateur du Christ qu’on peut vivre en vérité sa relation
à l’autre.
Il y a des souffrances qu’il ne faut pas oublier, mais qu’il
ne faut pas non plus mal interpréter. Beaucoup d’études ont montré un grand taux
de suicide chez les jeunes homos. Beaucoup ont en tête l’image des nuits fauves de Collard. Ces comportements
à risque ne sont pas liés à l’homosexualité en elle-même mais bien à la
difficulté de s’accepter en vérité. Beaucoup préféreront d’être morts que pédés
et, parmi ceux qui commencent leur acceptation, certains resteront au milieu du
chemin, multipliant les pratiques à risque dans un rejet partiel d’eux-mêmes.
Tu aimeras ton prochain …
Mon prochain, c’est celui qui est différent de moi, parfois
radicalement différent, comme dans la parabole, c’est aussi celui qui m’est
proche.
On reproche souvent aux homosexuels de chercher leur propre
image dans celle de leur compagnon, ou de se refuser à l’altérité …
Tout d’abord, comme je viens de le dire, la découverte de leurs
désirs oblige les homosexuels à remettre en cause l’image qu’ils avaient d’eux
même. La découverte de mon homosexualité m’a amené à me rejeter moi-même, à
avoir une image de moi dévalorisée. Il n’est donc pas question de personnes qui
sont complètement obnubilées par leur propre image, mais parfois de personnes
qui n’arrivent pas à s’aimer eux-même.
Ensuite, deux hommes ou deux femmes ne sauraient être
identiques, et je n’ai jamais croisé aucun couple homo dans lesquels il n’y
aurait eu que très peu de différences. Certes, la différence des sexes n’est
pas là, mais l’humanité est tellement pleine de variations, de nuances, de
différences … Deux êtres qui s’aiment ce sont toujours deux univers qui se
rencontrent. Parfois, ils se rencontrent sur des points communs, parfois sur de
la complémentarité, parfois sur de la différence, en tout les cas, ce sont deux
univers qui se mettent à tourner ensemble.
L’argument du refus de l’altérité me blesse. Sous prétexte
que mon partenaire a un point de commun en plus que ce qu’on rencontre habituellement
dans les couples, on en déduit que j’aurais peur de la différence, que je la
refuserais …
Se risquer à l’aventure de l’autre est pourtant une des
choses que je préfère. Découvrir chez les autres des points communs donne
toujours un sentiment de bien-être, mais découvrir ce qui fait les différences
est quelque chose qui me fait sentir vraiment vivant. Je ne peux que revoir
avec émotion les visages, les histoires que j’ai côtoyées dans ma vie, toutes
ces couleurs … Je revois les groupes de partage chrétiens –musulmans, catho - protestants,
franco-allemand, mes voyages en Algérie, au Sénégal et ce que j’ai pu essayer
de comprendre de ce qui ce vivait là-bas. Ma joie toute récente de voir les
multiples cultures, couleurs, histoires dans ma toute nouvelle frat.
Et, des personnes qui refusent d’accepter de reconnaitre la
réalité du lien qui m’unit à l’homme que j’aime se permettent de venir me dire
que je refuse l’altérité ?
L’amour qu’un homme peut ressentir pour un autre homme, qu’une
femme ressent pour une autre femme suit les même chemins, rencontre les mêmes
difficultés, les mêmes joies, … que celui d’un homme pour une femme. L’attirance
sexuelle se manifeste des mêmes façons et peut être transcendée tout aussi bien
dans l’amour. Il existe aujourd’hui en France un certain nombre de personnes
qui s’aiment, se protègent, sont fidèles parfois depuis des dizaines d’années,
mais qui pour l’instant ne peuvent être reconnus dans le mariage.
Comme pour les hétérosexuels, il s’agit d’être vrai avec les
attirances et les sentiments que l’on ressent. Prendre le temps de discerner la
vérité et la profondeur d’un sentiment avant de s’engager. Mais, aussi savoir
regarder en vérité ce sentiment qui nous fait vivre : en couple nous avons
traversé déjà du meilleur et du pire, nous nous sommes déjà disputés et déjà
soutenus. Certains ont déjà vécu l’agrandissement de la famille, les nuits à
veiller, les couches à changer, l’émerveillement d’un sourire au matin …
Cet amour de l’un pour l’autre qui débouche parfois sur l’arrivée
d’un troisième est gravement jugé par certains. Ceux-là nous disent que, pour
protéger l’enfant, il faut que sa famille n’ait pas de cadre juridique. Ceux-là
nous disent aussi, au nom de la défense du mariage, que le mariage n’a jamais
été une histoire d’amour. Ceux-là oublient aussi que, quand le Christ parle de
ne pas rompre les liens du mariage, il s’agit avant tout de protéger la femme
de la répudiation.
Tu aimeras le Seigneur ton Dieu …
Parce qu’il nous aime, Dieu nous donne à vivre. Cet amour
inconditionnel de Dieu, je l’ai ressenti au plus profond de moi et il me fait
vivre. Comment aimer Dieu de tout mon cœur ? En vivant, en vérité, l’appel
à l’amour et à la vie que Dieu adresse à chacun d’entre nous. C’est pour cela
que je vis aujourd’hui en couple avec l’homme que j’aime. Parce que j’ai
toujours su que je n’étais pas appelé au célibat. Quand j’ai commencé à
vraiment accepter mes désirs homosexuels, je me suis posé la question de ce que
j’allais faire de ce que je ressentais. Même si je suis d’un naturel plutôt
rêveur et solitaire, je me sentais appelé à autre chose. Je sais que l’Eglise,
mon Eglise, celle dans laquelle je vis ma foi, propose un seul chemin pour les
homosexuels. En mon âme et conscience, l’appel que j’ai ressenti était autre.
Et l’arbre a porté du fruit. Ce choix que j’ai fait, celui de vivre en vérité l’amour
au sein d’un couple, m’a permis de grandir encore, de gouter à de nouvelles
choses et a permis la vie d’un couple avec toutes les richesses que cela
apporte. Alors, oui, vivre une relation d’amour en couple homosexuel est ma
façon de rendre grâce au Seigneur qui a
fait pour moi des merveilles. Sur mon chemin de vie, le témoignage que je
rends aujourd’hui est un autre des fruits que ma vie de couple a portés.
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